Un regard une image

 

 

Louis Boilly

Portrait de Mme de Saint-Ange Chevrier, huile sur toile, 1808

collection particulière © droits réservés

 

 

 

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La jeune femme, assise sur un rocher, contre deux troncs d'arbre, tourne légèrement la tête et regarde vers le haut à droite, attitude qui a pour principal mérite de mettre en valeur son cou. Elle est vêtue d'une robre blanche, très simple mais visiblement coûteuse : largement décolletée, la taille sous la poitrine, comme le veut la mode de l'époque, soulignée ainsi que l'épaulement, d'un ruban cramoisi. Elle tient à la main son chapeau de paille jaune ; négligemment posée sur le rocher et artistement froissée, une étole de faille, brodée et bordée d'un riche galon, dans la même teinte que la ceinture éclate en tons chauds. On remarquera l'escarpin léger de soie, dont on se demande comment la dame, venue dans cette « solitude affreuse », ne l'a pas mis en pièces en empruntant des chemins rocailleux pour venir ici...

 

dsc_0485Mme de saint-ange est peinte en pied dans un paysage très séduisant qui fait regretter que le peintre n'ait pratiquement pas abordé le genre. Site italien, alors qu'il n'a jamais le voyage dans la péninsule? Vraisemblablement. Il semble inspiré par la cascade de Tivoli. En tout cas une nature accidentée qu'éclaire un coup de soleil. Le procédé fait penser immédiatement aux paysages hollandais du siècle d'or. À moins qu'il ne faille chercher dans l'Angleterre de l'époque cette échappée aux frais coloris. Quoi qu'il en soit, Mme de Saint-Ange est l'exemplaire le plus séduisant des d'effigies que le maître à cette époque, les années 1800, a peintes en extérieur. Une série exécutée pendant les années Consulat et l'Empire et qui marquent l'apogée de sa carrière artistique.

 

Le regard perdu vers un ailleurs du modèle, les nuages sombres qui s'accumulent sur la tête de la jeune femme, le ravin obscur que surplombe la fabrique à l'aspect méridional prêtent à la toile une ambiance de sourde inquiétude, proprement pré-romantique. En cela Boilly se révèle sensible aux courants les plus novateurs de l'époque en Europe, on pense aux Anglais bien entendu, mais aussi aux portraitistes germaniques ou suisses.

 

Un mot sur le format : l'image (72 sur 59 cm.) s'accommoderait volontiers de dimensions plus monumentales, on retrouve ici le goût de Boilly pour les formats moyens qu'il dominait sans doute plus aisément.

 

Gilles Coyne

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Boilly, Rétrospective

4 novembre 2011 – 6 février 2012

Palais des Beaux-Arts

Place de la République – 59000 Lille

- Tél. : 03 20 0678 00

-Internet : www.pba-lille.fr